• 01. La distance en analyse géo-économique (25/02/10)

     

    Le présent travail traite le sujet de la distance en analyse géo-économique à l’aide de l’exemple du Canada et plus spécifiquement la province du Québec avec un accent particulier mis sur les villes et villages dans le Grand Nord. Le travail tient à expliquer comment le fardeau de la distance influence l’économie, mais aussi le niveau de vie des populations nordiques. Je vais diviser ce travail en quatre parties principales. En premier lieu, je vais expliquer quelques notions de la distance et son impact mondial. Par la suite, je vais définir la situation socio-économique du Canada et du Québec à l’aide d’une digression dans le domaine de l’histoire où je compare le Canada avec son pays voisin, les États-Unis. La troisième partie tient à comparer la situation canadienne ou québécoise avec celle en Russie. Pour en conclure, je vais essayer de résumer les faits les plus intéressants en nommant des mesures que l’on pourrait impliquer afin de diminuer les restrictions en lien avec la distance pour accélérer l’économie canadienne et surtout la situation des villes et villages dans le nord de ce pays.

    Au cours de l’histoire mondiale, certaines contraintes ont fait du facteur de la distance un problème majeur en ce qui concerne l’économie, la société et l’expansion territoriale. Certains peuples vivent encore aujourd’hui dans des conditions défavorables par rapport à la distance, si on prend l’exemple d’une famille africaine qui doit effectuer plusieurs heures de marche pour chercher son eau potable dont elle a besoin ou pour avoir accès à un hôpital en cas d’urgence. Dans certains pays en route de développement, le terme de l’espace en lien avec la distance est d’une importance majeure. Certains pays, comme l’Inde ou l’Indonésie ont un espace restreint pour une population de plus en plus nombreuse. En plus, l’espace est mal géré, car la plupart de la population se trouve dans les grandes villes, ce qui affecte par exemple le taux de criminalité ou de mortalité et aussi le niveau d’hygiène ainsi que le niveau environnemental. Cette restriction de l’espace facilite la transmission de maladies dans le cas d’une épidémie ou aussi des dommages personnels et matériaux dans le cas d’une catastrophe comme récemment à Haïti où l’on retrouve une densité de 352,3 habitants par kilomètre carré. Dans de tels cas d’urgence, la population est dépendante de la bonne volonté des pays développés où le facteur de la distance et de la population restent relativement stables comme dans les pays d’Europe où les agglomérations principales existent depuis de nombreux siècles. D’autres pays comme le Canada, la Russie ou la Mongolie ont le problème contraire et sont limités à cause d’un vaste territoire face à une population restreinte et n’ont souvent pas les moyens d’exploiter efficacement toutes les richesses et ressources cachées. Ce sont le cas du Canada et de la Russie que j’aimerais étudier et comparer de plus près.

    Le Canada n’a pas du tout les mêmes désavantages que les pays en voie de développement. On retrouve au Canada un niveau satisfaisant de moyens de transport comparable à celui de l’Europe. La jeune histoire du Canada a des avantages et désavantages. D’un côté, le pays n’a pas vécu beaucoup de contraintes historiques en ce qui concerne le transport et l’économie. La révolution industrielle, encore influencée par les liens avec les anciennes mères patries comme l’Angleterre et la France, a été bien adaptée, même si elle était moins importante et épandue qu’en Europe. Les inventions européennes telles que les réseaux ferroviaires, l’automobile ou l’avion ont été importées ou même testées en Amérique du Nord et favorisaient la conquête du continent. L’époque où le Canada ou les États-Unis étaient dépendants de nouvelles inventions ou même des animaux pour atteindre une certaine expansion était très courte. Les populations se sont ainsi vite épandues, cela n’a pris que deux cents ans pour peupler le continent de l’Atlantique au Pacifique, tandis que les royaumes européens étaient beaucoup plus petits, limités et morcelés et vivaient certaines restrictions. D’une certaine façon, le Canada était même avantagé par rapport à l’Europe vu qu’il ne subissait pas d’épidémies et grandes guerres. Jusqu’aujourd’hui, le Canada est un pays pacifique et stable avec un faible taux de mortalité et un bon système de santé. Mais tandis que les États-Unis se sont très bien développés et sont même devenus la puissance économique mondiale au cours de seulement trois cents ans d’histoire, le Canada n’a pas eu le même sort. Il y a trois raisons particulières pour expliquer ce phénomène. En premier lieu, cela s’explique par des raisons économiques historiques. La conception du mercantilisme qui prône le développement économique par l’enrichissement des nations au moyen du commerce extérieur. Cette idéologie économique était adaptée par la France et faisait du Québec une colonie-comptoir tandis que les Anglais visaient une colonie de peuplement. Le territoire français, au départ beaucoup plus important que les conquêtes anglaises, était seulement exploité par un nombre limité de paysans peu instruits qui ne restaient souvent que quelques années dans la colonie. Au début, cette idéologie semblait être gagnante, car l’Angleterre, qui avait davantage mis l’accent sur le peuplement voyait bientôt une révolte au sein de sa colonie qui se déclarait indépendante et formait enfin les États-Unis, ce que l’Angleterre essayait en vain d’empêcher au coût d’une guerre très chère et peu efficace. La France n’avait pas ce problème du développement d’un sentiment national et indépendantiste grâce à sa stratégie. Mais cette stratégie mène au deuxième facteur qui explique pourquoi les États-Unis sont économiquement plus fort. Les Anglais tentaient de coloniser les parties francophones du continent et vu qu’ils étaient beaucoup plus nombreux, la guerre était courte et le résultat assez logique. La présence des Anglais qui exploitaient un vaste territoire au profit de leur pays natal seulement, tandis que les États-Unis pouvaient établir leur propre économie, défavorisait et déterminait encore pendant des siècles le développement économique du Canada. Tandis que les États-Unis prenaient une grande expansion et achetaient même des territoires russes comme l’Alaska ou mexicains comme le Nouveau-Mexique, le territoire anglais ou canadien diminuait plus qu’il ne s’agrandissait et les États-Unis ne laissaient aux Anglais que des territoires nordiques trop éloignés et donc pour des motifs en lien avec le terme de la distance. La dernière raison pour le désavantage économique du Canada est justement en lien avec cela. L’espace nordique du pays était beaucoup moins diversifié et avantageux à exploiter que le territoire américain, ce qui crée un désavantage géographique par rapport à l’économie. Les plus grandes agglomérations canadiennes se trouvent ainsi dans le sud et proche du marché américain auquel le Canada est soumis et duquel il est dépendant.

    Au lieu de trop comparer le Canada avec les États-Unis, je vais essayer de comparer le pays avec la Russie. Cela a plusieurs raisons évidentes pour moi. En premier lieu, il s’agit des deux pays les plus grands de la planète et ils sont donc comparables au niveau de la distance. Deuxièmement, les deux pays sont situés dans le nord de la planète et donc géographiquement et climatiquement semblables. Troisièmement, la diversité ethnique est particulièrement élevée dans les deux pays, ce qui crée des restrictions sociales et conflits comparables. Aussi en ce qui concerne l’immigration, la Russie devient, comme le Canada, de plus en plus une destination pour les étrangers et tous les deux pays font face à un grand urbanisme et un exode rural, surtout au niveau des jeunes, ce qui rend Moscou comparable avec Montréal au Québec. Par contre, le fardeau de la distance est moins élevé en Russie, car le pays est plus que quatre fois plus peuplé que le Canada. Contrairement au Canada, la Russie s’est facilement rétablie des bouleversements sociaux et politiques dans le passé comme par exemple suite à la chute définitive de l’URSS en 1991. Si l’on regarde le niveau du PIB, celui de la Russie a augmente davantage durant les dernières années. Le Canada, qui occupait la huitième place mondiale en 2006 en ce qui concerne le PIB n’occupait que la douzième place en 2008. La Russie, à l’onzième rang en 2006 occupe en 2008 la septième place et a presque triplé sa valeur. Pourquoi la Russie a-t-elle pu réaliser ce bond en avant?

    Cela s’explique par des raisons économiques, politiques et géographiques. En ce qui concerne le fardeau de la distance, celui joue encore un rôle plus important en Russie. Comme le Chemin de fer Canadien Pacifique, la Russie a réalisé l’équivalent du Transsibérien qui est d’ailleurs beaucoup plus réputé et utilisé et qui attire de nombreux touristes, un élément avantageux que le Canada a négligé d’impliquer efficacement. La Russie a investie énormément d’argent dans la construction des routes et même les villes nordiques comme Novy Ourengoï sont liés au vaste réseau. Malgré que la différence entre le réseau routier russe, qui a une longueur d’environ 540,000 kilomètres et le réseau routier canadien, qui a une longueur de 416,000 kilomètres, est existante, mais proportionnellement peu différente, la Russie a su diversifier ce réseau, tandis que le réseau canadien est trop concentré au sud et peu concentré au nord. Cela mène à un autre facteur important, la situation des villes. Tandis que les plus grandes agglomérations canadiennes comme Vancouver ou Montréal se trouvent entièrement dans le sud, les villes russes sont placées d’une manière plus diversifiée et on trouve des très grandes villes au centre, dans le sud et même dans le nord allant de Kaliningrad à l’Extrême-Occident jusqu’à Vladivostok à l’Extrême-Orient. Tandis que le développement économique au Canada se déplace vers l’ouest et vers le sud, les villes dans l’est et le nord de la Russie ne cessent d’agrandir et enlèvent peu à peu le focus central sur Moscou ou Saint-Petersbourg, qui se trouve d’ailleurs déjà onze degrés plus au nord que la ville de Saguenay. Mais malgré cette décentralisation par rapport à la population et l’espace, il y a un certain retour vers le centralisme au niveau de la politique. Moscou contrôle largement Gazprom, officiellement une société anonyme russe qui est le premier exploitant et le premier exportateur de gaz au monde. Ils ont investi de l’argent dans les villes nordiques pour y exploiter des ressources, en y créant des infrastructures nécessaires, en développant des attraits touristiques ou on y construisant des centres de divertissement pour la population comme des cinémas, piscines ou casinos. Au Canada et surtout au Québec, le contraire est le cas. Il n’y a que des petits villages sur place où vivent une centaine de gens, tandis que les autres vivent plus au sud, notamment au Saguenay-Lac-Saint-Jean. En plus, les sommes investies par Hydro-Québec et celles investies par Gazprom ne sont même pas comparable. Au Québec, le taux de chômage et de suicides est élevé et les habitants n’ont que le strictement nécessaire comme infrastructures. En Russie, l’investissement économique dans un nouveau sens aux habitants nordiques et la réussite de ces projets se voit aussi en chiffres. Prenons trois villes en Sibérie : Sourgout dans le centre, Novy Ourengoï dans le nord et Kemerovo dans le sud. En 1959, il y avait une population de 6,000 habitants à Sourgout qui a augmenté lentement à 34,000 en 1970, mais en 2009, on y compte 301,890 habitants. À Novy Ourengoï, on trouvait seulement une population de 16,500 habitants en 1980 et 29 ans plus tard, on parle de 118,659 personnes. À Kemerovo, déjà assez peuplé en 1959 avec 289,000 habitants, on a presque pu doubler ce chiffre à 520,609 habitants en 2009. Prenons trois villes canadiennes d’une région éloignée comme la Sibérie au hasard: Whitehorse (19,157 habitants en 1996 et 20,461 en 2006), Thompson (14,385 en 1996 et 13,446 en 2006) et Saint John’s (101,934 habitants en 1996 et 100,646 habitants en 2006). On peut constater que le nombre d’habitants est à peu près resté constant dans chacune de ses villes. Il est sûrement inutile de mentionner des exemples extrêmes comme Schefferville ou Radisson au Québec, où la situation est encore plus extrême. Ces derniers exemples nous montrent d’ailleurs deux choses: Les investissements de l’état québécois dans les lieux éloignés étaient peu durables, les exploits sur les lieux d’une durée limitée et on n’a pas réussi à trouver des alternatives pour garder ces lieux en vie une fois que les mines étaient surexploitées. En ce qui concerne le niveau national du Canada, on peut constater que ce sont presque uniquement les villes nordiques à l’est du Canada qui voient un certain niveau de stabilité ou même une légère augmentation de la population comme à Whitehorse, mais aussi à Yellowknife ou même dans des petites villes telles que Fort Nelson. En comparaison avec la Russie, il faut aussi noter que la présence du pétrole à certains endroits que l’on n’a pas partout au Canada joue un rôle géographiquement important en ce qui concerne le développement des villes et la notion de la distance. C’est certain qu’on est loin de construire de faire des villes comme Iqaluit ou Labrador City des métropoles autour d’un demi-million d’habitants, mais cela n’excuse pas non plus le fait que ces villes sont en déclin démographique et les habitants de plus en plus isolés et désespérés.

    Comment peut-on donc finalement changer cette situation défavorable? Qu’est-ce que le Canada et particulièrement l’est du Canada avec le Québec doit améliorer pour affronter le fardeau de la distance? À l’exemple de la Russie, on a vu qu’un bon réseau routier est une base indispensable. Le fait que de telles démarches sont en route est déjà un élément positif, mais ce n’est pas encore assez. On devrait non seulement agrandir le réseau des routes, mais aussi le réseau ferroviaire et le rendre plus attirant en augmentant la vitesse et le confort dans les trains. Il est inacceptable que cela prend huit heures pour se rendre de Chambord à Montréal en train, si l’on peut faire ce même chemin en même pas cinq heures en voiture. C’est un peu la même chose pour le train entre Sept-Îles et Schefferville. Pour rendre les destinations nordiques plus intéressantes, il faut investir dans la publicité et le tourisme, mais il faut surtout rendre les villes plus attirantes. On pourrait créer un réseau de pistes de ski ou de motoneige et y créer des centres touristiques. Un vaste réseau pour faire de la chasse ou de la pêche est déjà naturellement disponible. Plus tard, il faudrait créer des petits centres d’achats favorisant le marché régional et des lieux de divertissements comme par exemple des casinos ou cinémas. Politiquement, il faudrait collaborer encore plus proche avec les Premières Nations et développer plus d’ententes et contrats. Le nord a d’ailleurs beaucoup de richesses à exploiter et sûrement encore beaucoup de ressources précieuses cachées que les scientifiques devraient trouver. Sinon, il reste toujours l’hydroélectricité. Pour financer tout cela, on pourrait agir de deux manières. À l’exemple de la Russie et surtout de la Chine, on voit que leurs géostratégies, basées sur un état gauchiste favorisant l’économie, ce que l’on a tendance à nommer le «capitalisme rouge», sont très efficaces et ont fait augmenter le niveau de vie des populations des deux pays considérablement. Le Canada ou le Québec ne devrait pas avoir peur de sortir de sa passivité conservatrice pour impliquer des changements. L’état devrait plus guider l’économie pour ne pas abandonner les habitants du nord du pays. Le deuxième facteur est le développement des centres urbains déjà établis. L’équilibre s’oriente de plus en plus vers l’ouest du Canada et vers des métropoles comme Toronto, Calgary ou Vancouver. Le Québec devrait rétablir le statut de prépondérance des métropoles telles que Montréal et la ville de Québec. On devrait aussi soutenir le développement du Saguenay, le portail vers le nord par la suite et accélérer l’économie de cette manière. Ce sont des projets à longs termes, mais la Chine et la Russie nous ont montrées que les effets se remarquent très vite. Pour en conclure, je suis convaincu que l’on pourrait transformer le fardeau de la distance et de l’espace en un avantage pluraliste et diversifié, lorsque l’on investit d’abord dans des structures déjà existantes et multiplie par la suite ses efforts pour ramener les structures plus récentes à un niveau comparable et acceptable.

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