• 18. Entrevue à un parent (20/03/12)

     

    Jean-René BOUTIN, Sarah CIMINO, Charlotte DEFLEUR, Lucie HUGGENBERGER. Sebastian KLUTH

     

     

     

    École et société

     

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    ENTREVUE À UN PARENT

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Travail présenté à

     

    Mme Monica CIVIDINI

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Département des sciences de l'éducation

     

    Université du Québec à Chicoutimi

     

    Le 15 mars 2012

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    1. Introduction

     

     

     

    Pour commencer le travail, nous avons tout d’abord recherché autour de nous des parents dont les caractéristiques nous permettraient de les interviewer. Nous avons alors choisi de prendre Fabienne Savard qui a élevé seule ses deux enfants et qui correspondait donc au style de famille monoparentale. La thématique de la monoparentalité au Québec est plus actuelle que jamais. En 2001, un enfant sur cinq dans la province vit dans une famille monoparentale.[1] Vu que cette tendance a progressivement augmenté au fil du temps[2] et devient de plus en plus une réalité dans nos situations d’enseignements, on voulait cibler un de ces cas afin d’analyser les impacts de la monoparentalité sur le développement de l’enfant.

     

     Afin d’avancer dans le travail, nous avons pris la décision de nous répartir les différentes tâches demandées. Jean-René étant proche de la personne à interviewer et Sebastian le connaissant depuis un certain temps, ce sont eux qui se sont dévoués à interroger notre personne ressource ainsi qu’à retranscrire l’ensemble de la conversation. Pour cela, nous avions tous ensemble établi une série de questions préalables en classe, mais certaines questions plus concrètes et certaines interventions spontanées ont également eu lieu durant l’entrevue.

     

    Lorsque cette partie du travail a été réalisée, Sarah, Lucie et Charlotte ont commencé l’analyse à l’aide de «google.doc» ce qui permettait à tous et à toutes d’ajouter des éléments pertinents lorsqu’ils le souhaitaient. Afin de finaliser le travail à rendre, nous nous sommes concertés à plusieurs reprises et vus une dernière fois dans le but de nous assurer que notre travail était complet.

     

    Grâce à ce rapport, nous avons pu mettre en pratique tous les points vus dans le cours. En effet, pour analyser l’entrevue avec Madame Savard, nous avons dû parcourir l’ensemble du cours ce qui nous a permis de le revoir dans son ensemble.

     

     

     

     

     

    2. Liste des facteurs sociaux influençant la réussite de l’élève

     

     

     

                Nous pouvons identifier un total de six facteurs sociaux influençant la réussite de l’élève en question. Les passages en lien avec ces éléments sont soulignés dans la transcription de l’entrevue.

     

                En premier lieu, il y a le facteur du climat affectif. La mère monoparentale n’a pas cherché à se remettre en couple, mais préféré profiter au maximum de sa famille qu’elle considère comme une priorité. L’environnement familial est donc resté stable suite au décès du père et la mère a fait passer le souci collectif avant l’épanouissement individuel.

     

                Ensuite et en lien avec le premier facteur, il y a celui de la disponibilité de la mère. Suite au décès de son mari, elle n’a pas repris de travail et s’est occupée à temps plein de ses enfants. Elle a fait passer ses loisirs personnels après l’éducation de ses enfants et ne faisait que des cours et exercices de peinture pendant que ses enfants fréquentaient l’école. Le soir, elle a régulièrement aidé ses enfants à faire leurs devoirs afin de s’assurer qu’ils n’aient pas de retard académique dans le but de minimiser les facteurs à risque pour eux suite à l’événement perturbant qui était la mort de son mari.

     

                Un autre facteur social favorable à la réussite scolaire est le niveau d’instruction de la mère. Elle a obtenu un baccalauréat en archéologie ainsi qu’un certificat en histoire de l’art à l’Université Laval et est donc très instruite. Les soirs, elle a assisté ses enfants lorsqu’ils réalisaient leurs devoirs. Dans son temps libre, elle organisait également des soirées de lecture avec eux quand ils étaient jeunes. Elle n’est pas fuyante face à l’école. Aujourd’hui, son fils est inscrit à l’Université du Québec à Chicoutimi et poursuit une carrière académique couronnée de succès et sa fille est inscrite à un programme d’études spécial avec une concentration en musique qui demande beaucoup de déplacements, d’études et d’implication en dehors du cadre scolaire régulier autant de la part de l’élève que du parent.

     

                 Par la suite, nous avons pu identifier comme facteur favorable le niveau socio-économique de la mère. Bien qu’elle n’ait pas travaillé depuis la naissance de ses enfants, elle a reçu de l’aide financière de l’État. Même si la somme accordée par l’État était plutôt limitée selon les dires de la mère, elle a pu maintenir un niveau socio-économique satisfaisant et stable car son mari avait pris les assurances adéquates avant son décès ce qui a permis à la famille de garder la maison, par exemple.

     

                Un autre facteur est celui de la prise d’autonomie rapide. La mère n’a pas fait d’appel à l’aide extérieure à part avoir consulté un psychologue pour savoir comment vivre le deuil avec ses enfants. L’environnement social était donc sécurisant puisque la mère était toujours disponible et à l’écoute des besoins de ses enfants, que ce soit au niveau alimentaire en se préoccupant de la nutrition de ses enfants qui avaient plusieurs allergies alimentaires, que ce soit au niveau scolaire en accordant du temps pour les aider à effectuer leurs devoirs et en étant en contact constant avec les enseignants de ses enfants ou que ce soit au niveau social en organisant des soirées avec ses enfants et en les encourageant à fréquenter leurs pairs. Grâce à cette implication, la mère a pu compenser le fait que les enfants n’aient pas reçu beaucoup d’aide de la part de l’équipe-école concernée suite au décès de leur père.

     

                En dernier, un facteur important concernant la réussite scolaire des enfants était leur satisfaction à fréquenter l’école. Si nous prenons en considération les trois missions de l’école québécoise, nous pouvons détecter une réussite dans chaque volet. Au niveau de l’instruction, l’enfant en question a prouvé à plusieurs reprises sa bonne performance académique. Concernant le volet de la qualification, le fils a eu une bonne orientation académique en développant des plans précis pour son futur. En ce qui a trait au niveau du volet de la socialisation, le jeune garçon faisait partie d’un bon groupe d’amis fidèles et n’avait pas de problèmes à entrer en contact avec les autres jeunes de son âge malgré quelques moments de harcèlements liés à sa bonne performance scolaire plutôt qu’au fait qu’il avait grandi sans père.

     

     

     

    3. Analyse du facteur social choisi

     

     

     

    Dans cette partie de notre travail, nous allons parler plus précisément du facteur social de la «disponibilité du parent». Ce facteur est intéressant à analyser puisqu’il est indéniable qu’il est important dans la réussite scolaire d’un enfant. En effet, cette mère a pu, grâce à certaines facilités financières, ne pas reprendre un travail et elle a donc été capable de s’occuper à plein temps de ses enfants ainsi que de leur éducation scolaire.

     

     Nous pouvons dès lors considérer qu’elle ne fait pas partie des parents «fuyants» étant donné qu’elle ne s’éloigne pas des questions relatives à la scolarité de ses enfants. Au contraire, elle nous explique qu’elle a toujours pris beaucoup de plaisir à superviser leurs devoirs et à leur lire des histoires. Elle fait donc partie des parents impliqués et coopérants.

     

    Dans la situation vécue par les enfants de cette mère, ce facteur a été fort probablement déterminant dans leur réussite scolaire. Avoir une mère qui a du temps à consacrer à la supervision des devoirs, au contrôle de l’étude et à la motivation relative à l’envie d’aller à l’école est très positif pour des enfants.

     

    Cette mère a effectué des études ambitieuses. Elle connaît donc le système scolaire et elle lui fait confiance. Elle s'est efforcée d'être disponible pour répondre aux besoins scolaires de ses enfants. Même si elle fait confiance en l’institution scolaire, elle n’a pas une confiance aveugle comme la confiance qu’à un patient face à son médecin puisqu’elle connaît le système. Elle garde alors un esprit critique face à celui-ci.

     

    Le fait que cette mère soit disponible lui donne du temps pour observer ses enfants tant dans leur parcours scolaire que dans leur développement personnel et social. Ces deux données sont indissociables. Si ses enfants ne se développaient pas personnellement et socialement correctement, leur réussite scolaire n’aurait probablement pas été telle qu’elle s’est déroulée.

     

    D’un autre côté, la mère regrette cependant le manque d’intervention des écoles. Elle trouve que ces institutions auraient pu appuyer ses efforts dans l’éducation de ses enfants. Une raison pour un manque d’intervention rapide de la part du corps enseignant suite au décès du père est selon la mère un changement d’enseignant qui avait lieu environ en même temps. On peut donc constater un manque de collaboration, de concertation et de planification de la part de l’équipe-école en question. La mère constate que la plupart des enseignants ont ignoré la thématique et faisaient confiance à la bonne réussite scolaire de son fils surtout sans s’interroger sur son développement personnel et son bien-être. Une exception et un contre-exemple négatif est celui d’une enseignante qui est intervenue trop rapidement et qui a réagi de manière trop préventive en surévaluant quelques comportements de l’enfant à un tel point d’aller jusqu’à la consultation presque immédiate d’un psychologue. Celui-ci a par la suite mis les choses au clair et rassuré l’enseignante en question autant que la mère et l’enfant lui-même.

     

     

     

    4. Conclusion

     

     

     

                Pour en conclure, tous les six facteurs sociaux identifiés dont celui de la «disponibilité du parent» que nous jugeons être primordial dans le développement de l’enfant, ont fait en sorte que les enfants du parent de famille monoparentale ont toujours eu le soutien nécessaire de la mère qui les encourageait à exceller dans leurs performances scolaires. Les choix de la mère de prioriser l’avenir de ses enfants en faisant des sacrifices personnels comme celui de limiter le temps pour ses loisirs, de ne pas chercher le bonheur personnel en tentant de se remettre en couple et de ne pas retourner sur le marché du travail dans le but d’accumuler plus d’argent pour réaliser des rêves potentiels ont fait en sorte que les enfants ont été très bien accompagnés lors de leur passage scolaire allant de l’école maternelle jusqu’à l’université dans le cas de son fils. Cet accompagnement ne s‘est non seulement fait au niveau intellectuel, mais aussi au niveau familial, financier et social. 

     

    En analysant les réalités et risques de la monoparentalité, nous avons réalisé dans notre cas que beaucoup de préjugés que l’on a tendance à porter face à ce mode de vie comme les idées de l’appauvrissement matériel de la famille, de l’appauvrissement psychologique ou encore de l’appauvrissement social peuvent s’appliquer très peu ou même pas du tout. Le cas observé n’a pas fait preuve de problèmes psychologiques, scolaires ou sociaux. Il est en fait beaucoup moins problématique qu’un bon nombre d’enfants issus de familles biparentales. Ceci nous prouve qu’il faut toujours analyser, intervenir et observer cas par cas de manière différente, objective et ouverte d’esprit en collaborant avec l’élève lui-même, l’équipe-école et surtout le parent dans un cas de monoparentalité pour découvrir les réalités sociales que les élèves de nos classes vivent afin de les accompagner, de les encadrer et de répondre à leurs besoins de la meilleure façon possible. 

     

     

     

     

     

    5. Bibliographie

     

     

     

                Bawa, I. H. (2008). Estime de soi et performances scolaires chez des adolescents (Togo). Mémoire de DESS en psychologie. Université de Lomé. Lomé. Nombre de pages totales inconnu.  

     

                Saint-Jacques, M.-C., Turcotte, D., Drapeau, S. et Cloutier, R. (2004). Séparation, monoparentalité et recomposition familiale – Bilan d’une réalité complexe et pistes d’action. Presses de l’Université de Laval. Québec. 442 pages.

     

                Valois, J. (1993). Sociologie de la famille au Québec. Les Éditions CEC. Montréal. 333 pages.

     

                 

     

     

     

     

     

    6. Transcription de l’entrevue

     

     

     

    Sebastian Kluth: «Bonjour, mon nom est Sebastian Kluth et je suis étudiant au baccalauréat en enseignement secondaire avec le profil univers social à l’Université du Québec à Chicoutimi. Je suis en ma troisième année et je suis présentement avec Fabienne Savard de Dolbeau-Mistassini afin de réaliser une entrevue auprès d’un parent d’un élève de famille monoparentale dans le cadre du cours «École et société» avec Monica Cividini. Nous sommes présentement à Chicoutimi et nous sommes le neuf mars 2012. Donc, euh, vous êtes d’accord avec le fait que cette entrevue sera enregistrée pour de buts de recherche et si vous voulez bien, on peut commencer tout de suite. Donc, euh, ma première question, ça serait, euh, si vous pourriez… si vous pouviez nous décrire brièvement votre situation familiale.»  

     

     

     

    Fabienne Savard: «Eh bien, disons que je suis veuve avec… euh… deux enfants. Euh, mon mari est décédé, euh, en quatre-vingt-seize alors que ma fille avait huit mois et mon garçon cinq ans. Euh… c’est ça.»

     

     

     

    S.K.: «Et après la mort, euh, prématurée de votre mari, vos deux enfants, un frère aîné et une sœur plus jeune, ont grandi dans un cadre monoparental. Pourriez-vous nous décrire brièvement les différences entre l’éducation des vos enfants lorsque votre mari était encore en vie et l’éducation que vous avez donnée à vos enfants après sa mort?»

     

     

     

    F. S.: «Disons qu’avant, on était deux à décider des choses, euh, je peux donner comme un exemple quand mon mari était en vie, ça commençait, les ordinateurs à la maison puis lui, bien, il voulait, il avait hâte d’acheter un ordinateur pour les enfants, puis moi, j’avais hâte d’acheter un piano, puis, c’est sûr que là, après son décès, bien c’est moi, on, euh, c’était dans mes décisions à moi là, j’ai acheté un piano. Ce n’était plus, ce n’était plus concerté, euh, c’est ça d’être toute seule à prendre des décisions et à avoir des conséquences aussi. C’est de ne pas se sentir nécessairement appuyé, de ne jamais pouvoir confronter l’opinion avec quelqu’un d’autre, fait qu’il faut avoir beaucoup de confiance, que qu’est-ce qu’on peut prendre c’est la bonne décision parce qu’on ne peut pas justement confronter avec quelqu’un d’autre, là, on ne peut pas agir de concert. C’est ça.»

     

     

     

    S. K.: «Okay, et, euh, avez-vous été aidé du soutien de la part d’autres membres de la famille ou de la part de la communauté après le décès de votre mari dans l’éducation de vos enfants?»

     

     

     

    F. S.: «J’ai eu ma mère qui demeurait en bas de chez moi, qui, euh, s’est pas vraiment mêlée de l’éducation; là, de l’orientation des choses, mais qui m’a aidé, bien, quand j’allais aux magasins, elle gardait les enfants. Euh, mon beau-père m’a aidé surtout au début avec ma belle-mère aussi. Ils venaient faire des tours et c’est déjà positif, ils m’ont été un support au début, puis, ma belle-mère m’apportait de la nourriture des fois. Ma mère m’aidait dans les repas aussi, on faisait tout ensemble. Les amis, euh, je voyais pas beaucoup d’amis à ce moment-là. Non, je pense pas que mes amis m’aidaient dans l’éducation de mes enfants. C’est plus moi, c’était vraiment, c’était pas mal tout le temps sur mes épaules. Ouais.»

     

     

     

    S. K.: «Et est-ce que vous avez fait appel à des ressources extérieures pour vous assister dans vos tâches parentales? En dehors du cadre familial et du cadre amical?»

     

     

     

    F. S.: «C’était plus au début, euh, j’étais allée voir un psychologue pour m’aider, pour euh, savoir comment fonctionner avec, euh, avec mes enfants, euh, avec mon plus vieux, euh, pour pas qu’il soit traumatisé dans l’événement. J’ai lu beaucoup de livres, mais pas tant sur l’éducation des enfants, là, que sur le deuil puis euh, j’ai pas, je me suis plus fiée à ce que je ressentais pour éduquer mes enfants que sur les livres, que dans les livres ou les conseils des autres parce qu’il n’y a pas une famille pareille, puis il n’y a pas une personne de pareille et bon, des conseils des uns ne peuvent pas nécessairement aller avec ce qu’on vit, nous autres. Puis, j’avais, quand mes enfants sont nés, il y a une infirmière qui m’avait dit que, qu’il fallait se fier à son cœur pour savoir quoi faire. Bien, c’est ça que j’ai essayé de faire quand j’avais des choses à, des décisions à prendre.»

     

     

     

    S. K.: «Euh, est-ce que vous avez été en contact avec, euh, d’autres jeunes mères ou pères qui étaient dans une situation semblable à la vôtre? Et si oui, comment est-ce que ces personnes-là ont vécu leurs situations? Est-ce qu’il y avait des différences avec votre situation ou des similarités?»

     

     

     

    F. S.: «Je n’ai pas vraiment eu de personnes, euh, où il y a eu, peut-être, là, une personne que je connaissais que son mari était décédé, puis qui m’avait dit très peu de temps après la mort de mon mari, euh, que mes enfants avaient droit d’avoir une mère qui souriait. La mort, venant d’elle, je savais qu’elle, elle avait vécu ça, qu’elle m’avait apporté quelque chose, mais j’ai pas vraiment reparlé, là, c’était au hasard d’une rencontre. Euh, j’avais une personne que j’ai connu après la mort de son mari qui avait un enfant, mais son enfant était déjà vieux, déjà dix-sept, dix-huit ans. On a échangé un peu, c’est ça, mais je ne pouvais pas vraiment comparer avec ma situation. Euh, non, j’ai pas vraiment eu, je n’ai pas été dans un groupe d’aide non plus pour ça. Non.»

     

     

     

    S. K.: «Est-ce que vous avez obtenu de l’aide financière de l’État? Et si oui, est-ce que cela a pu vous aider?»

     

     

     

    F. S.: «Euh bien, j’ai eu ma régie des rentes, là, ça s’appelle la rente du conjoint survivant. Oui, ça m’a aidé et heureusement, mon mari avait pris des assurances et ça m’a permis de pouvoir rester à la maison et de ne pas être au travail. Je trouvais ça important d’être à la maison, parce que je me disais déjà, mes enfants n’ont pas de père, je suis, je tenais à ce qu’ils aient une mère qui soit vraiment disponible. C’est pas un gros montant, l’État, là, mais en tout cas, dans mon cas à moi, à cause des assurances, ça m’a permis de rester à la maison, pour compenser. Mais peut-être que pour d’autres, c’est, ce serait, probablement, ce ne serait pas assez s’il y avait pas les assurances.»

     

     

     

    S.K.: “Avez-vous fait des études qui auraient pu vous permis d’avoir un travail capable qui aurait couvert vos frais domestiques?”

     

     

     

    F.S.: «Oui, j’ai obtenu un baccalauréat en archéologie ainsi qu’un certificat en histoire de l’art à l’Université Laval.»

     

     

     

    S. K.: «Donc avant le décès de votre mari, vous avez travaillé et suite à ça, vous avez arrêté?»

     

     

     

    F. S.: «Euh, avant la naissance de mes enfants, j’avais travaillé. Ouais, je ne m’étais pas vraiment arrêtée et je ne m’étais pas encore, je venais d’avoir un bébé et je ne m’étais pas encore posée la question de ce que j’allais faire.»

     

     

     

    S. K.: «Est-ce qu’il y avait d’autres passe-temps, euh, qui se sont faits remarquer après la mort de votre mari à part juste dans l’éducation de vos enfants, je veux dire, est-ce que vous avez dû laisser, je ne sais pas, un passe-temps préféré ou un travail ou quelque chose dans ce goût-là?»

     

     

     

    F. S.: «Euh, j’ai, je me suis vraiment consacrée à la famille, parce que, si, en fait, mes enfants faisaient des allergies, aux produits laitiers, aux œufs et puis aux arachides. Il fallait vraiment que je fasse, là, une cuisine spéciale qui, avec des ingrédients premiers, non transformés, donc ça veut dire, on n’achète pas une pizza à l’épicerie, là, pour le dîner. Euh, laisser des choses, que, c’est sûr que je ne suis jamais parti en voyage, euh, j’ai, les passe-temps que j’avais, ça s’appelait pas des passe-temps, mais, parce que le temps passait quand même assez vite. Ça s’appelait, on va prendre une marche pour se serrer l’esprit. Euh, j’ai jamais fait, ce que j’ai fait, c’était toujours de, en essayant de ne jamais nuire à mes relations familiales, de ne pas, ça veut dire, jamais, je n’ai pas vraiment pris une soirée pour faire quelque chose par plaisir quand mes enfants étaient jeunes. J’ai, non, je me suis quand-même beaucoup oubliée dans ça. Euh, plus tard, bien, j’ai commencé à faire de la peinture. Pour ça, je prenais des cours pendant que mes enfants étaient à l’école. Puis, je faisais de la peinture quand mes enfants étaient à l’école aussi. Le soir, on faisait nos devoirs, non faisait les devoirs et les leçons ensemble. On faisait des activités familiales, là, des soirées de lecture. C’est comme ça qu’on, que je me faisais des petits plaisirs. Mes petits bonheurs, c’était dans la famille, toujours.»

     

     

     

    S.K.: «Est-ce que vous avez songé, quelques années après la mort de votre mari, de chercher un nouvel homme à vos côtés pour, euh, pour aider vos enfants?»

     

     

     

    F. S.: «Non, j’ai jamais cherché. Euh, je suis assez peureuse puis je ne suis pas sûr si ça avait été une bonne idée. Avec tout ce qu’on voit, j’avais pas envie de mettre un élément nouveau dans la maison qui était inconnu et incertain. Euh, non, je trouvais qu’on fonctionnait bien comme ça et qu’on n’avait pas; c’est sûr qu’il y avait, qu’il manquait l’élément masculin, peut-être, là.»

     

     

     

    S. K.: «Et est-ce que cette situation s’est répercutée sur la socialisation de votre jeune dans le cadre scolaire, avec ses pairs? Je veux dire, est-ce qu’il a eu une facilité de se faire des amis et est-ce que ses premiers cercles d’amis avaient des traits particuliers? Est-ce que les amis, aussi, étaient moins ou plus importants pour lui que le soutien familial?»

     

     

     

    F. S.: «Je crois pas que ses amis étaient... La façon qu’il les voyait était une façon assez normale, je crois, mais peut-être que ça lui a manqué pour avoir confiance en lui, euh, à l’école, euh... C’est sur qu’il était très, euh, très loyal envers ses amis... mais je croirais pas que c’était de la dépendance par manque d’un père. Je pense que c’est un trait, c’est familial d’être loyal envers ses amis. Je pense que dans ses bons amis, les, les... il a quand même vu les relations avec leur père. Euh, c’est sûr que c’est pas comme avoir un père, mais... Puis, il les a pas pris en tant que tel non plus, mais euh, il a quand-même probablement tiré certaines choses, euh, de ça. J’pense que de toute façon il n’aurait pas vraiment voulu avoir un père pour remplacer son père. J’pense que ça aurait été peut-être difficile pour lui.»

     

     

     

    S.K.: «Quel rôle est-ce que les écoles ont joué dans la socialisation de votre fils? Est-ce que vous ou plus tard votre fils lui-même avez fait appel aux ressources des écoles dans certaines situations? Je veux dire, est-ce qu’il a rencontré des intervenants pour parler de sa situation familiale ou sociale et aussi comment est-ce que ses premiers enseignants ont réagi envers lui et sa situation particulière?»

     

     

     

    F. S.: «Hum, je crois que ses premiers enseignants, quand c’est arrivé il était à la maternelle, je crois que il y a eu un problème de changement de professeur à ce moment-là. Puis, la professeure ne le connaissait pas beaucoup et elle a comme pris peur. Elle a pris peur que son agissement qui était un peu agité l’empêche d’acquérir des habiletés. Puis, elle a fait appel tout de suite à un psychologue qui lui, a dédramatisé la situation pis dit que c’était normal la façon dont il réagissait, puis, euh... Je n’ai jamais remarqué ou su qu’un professeur faisait quelque chose de spécial pour, euh, cette situation-là. Jamais. Même si, à certains moments, les professeurs auraient pu faire quelque chose, il n’y a jamais rien qui a été fait pour faciliter quoi que ce soit.»

     

     

     

    S.K.: «Votre jeune a-t-il eu des difficultés scolaires et si c’est le cas, est-ce que vous pensez qu’elles sont liées directement ou indirectement avec la situation particulière?»

     

     

     

    F.S.:«Euh, il n’a jamais eu de difficultés scolaires académiques. Il a toujours très, très bien réussi. Il y a peut-être eu des fois du harcèlement de la part d’autres enfants justement parce que c’était un petit gars qui était à son affaire puis qui réussissait bien, mais, euh, académiquement il n’a jamais eu de problèmes.»

     

     

     

    S.K. :« Est-ce que vous diriez que votre enfant est aujourd’hui sur le même niveau de socialisation que les autres jeunes ou que les amis de son âge que vous connaissez?» 

     

     

     

    F.S.: «Oui.»

     

     

     

    S.K.:«Et, euh... Votre fille, quant à elle, a grandi dans une situation semblable. Est-ce qu’il y avait des différences entre son développement et celui de son frère? Est-ce qu’il y a des approches que vous avez modifiées après vos premières expériences avec votre fils et comment est la relation entre votre fils et votre fille?»

     

     

     

    F.S.: «Euh oui, c’est sûr que ça n’a pas été la même chose, euh... parce que ma fille elle a, elle a pris mon... Elle a pris son frère comme euh... presque... Ils avaient cinq ans de différence. Elle l’a pris comme l’élément masculin, paternel qui lui manquait, un peu, puis aussi un peu comme un toutou. Pis euh, oui, aussi j’ai essayé de modifier des choses parce que... En fait, j’ai pas vraiment essayé, mais il y a des choses qui se sont modifiées, peut-être à cause du temps qui a passé, cinq ans de différence, peut-être à cause aussi du fait qu’avec le premier enfant, on est très alerte à toutes sortes de choses et on l’est moins avec le deuxième.»

     

     

     

    S.K.: «Est-ce qu’il y a des choses que vous voudriez changer dans l’éducation et socialisation de vos enfants si vous aviez la chance de recommencer à zéro?»

     

     

     

    F.S.: «Bien, c’est sur que j’aimerais ça être toujours parfaite. Pis euh... être plus optimiste, plus positive.»

     

     

     

    S.K.:«Quelle perception avez-vous du regard des autres sur votre situation?»

     

     

     

    F.S.: [Silence de réflexion]

     

     

     

    S.K.: «Par exemple, est ce qu’on vous a déjà fait sentir que votre situation était inappropriée ou quelque chose comme ça?»

     

     

     

    F.S.: [Silence de réflexion]

     

     

     

    S.K.: «Est-ce que les gens ont été empathiques envers vous ou non?»

     

     

     

    F.S.:« [Inaudible] sont plutôt empathiques. Euh, c’est sur que les amis, ça donne des fois des conseils... pas toujours bien placés. Des fois c’est, des fois ça nous fâche... moi en tout cas. Mais, euh, on prend du recul, puis on se dit que ça a du bon sens, mais c’est difficile de, de modifier des choses. Chacun a sa situation et on vit comme on peut. On fait ce qu’on peut avec ce qu’on a du mieux qu’on peut.»

     

     

     

    S.K.:«Est-ce que vous voyez des points d’amélioration en ce qui concerne le soutien des écoles, de l’État ou de la société concernant la socialisation d’un élève de famille monoparentale qui pourraient se passer?»

     

     

     

    F.S.:«C’est sûr qu’il pourrait toujours y avoir des améliorations, mais je le verrais... Bien, c’est sûr que monétairement, euh, ça pourrait être amélioré. Euff... Ça pourrait... Les professeurs pourraient plus tenir compte des situations. C’est sûr que les classes sont nombreuses, ils peuvent pas vraiment prendre... Si les classes étaient moins nombreuses, peut-être que ça serait plus possible de prendre en compte les situations des élèves. Plus à ce niveau-là. Faire des groupes, euh... En général, il y a plus, dans les petites villes, il n’y a pas assez de gens qui vivent la même situation en même temps pour faire des groupes, là. Euh, ca serait plus au niveau fonction professeur-élève pour vérifier aussi si il n’y a pas de harcèlement.»

     

     

     

    S.K.: «Et euh... Pour terminer quels seront les conseils que vous donneriez à une autre famille monoparentale qui vit une situation semblable à la votre? Quelles sont les choses à faire? Quelles sont les choses à ne pas faire?»

     

     

     

    F.S.: «Hum... Bin, les choses à pas faire c’est... c’est euh... Moi je trouve, en tout cas, que quelqu’un qui veut refaire sa vie à tout prix, puis qui sacrifie sa vie familiale, ses enfants à se trouver un conjoint, ça c’est, c’est... moi, je trouve que c’est très néfaste. En plus, ça peut avoir des conséquences très, très néfastes. Euh, les choses à faire, c’est... Moi, je pense que c’est de privilégier le bonheur qu’on peut avoir d’être ensemble puis les, euh, les petites choses qu’on peut faire, puis l’amour qu’il y a entre les membres de la famille.»

     

     

     

    S.K.: «D’accord. Alors est-ce qu’il y a une dernière chose que vous voudriez dire parce que sinon... ça mettrait un terme à notre entrevue?»

     

     

     

    F.S.:«Non.»

     

     

     

    S.K.: «D’accord. Alors, je vous remercie beaucoup. Ça a vraiment été très enrichissant comme entrevue. Je sais que c’est difficile d’en parler. En fait, on le sait, mais on peut pas vraiment le savoir non plus parce qu’on est pas nous-mêmes dans une situation comme ça, donc je vous remercie beaucoup pour votre ouverture d’esprit et votre courage d’en parler à moi et je vous souhaite une bonne poursuite dans votre vie familiale avec vos enfants.»

     

     

     

    F.S.: «Merci, c’est gentil.»

     

     

     

    [Fin de l’enregistrement]

     

     

     

     


    [1] Saint-Jacques, M.-C., Turcotte, D., Drapeau, S. et Cloutier, R. (2004). Séparation, monoparentalité et recomposition familiale – Bilan d’une réalité complexe et pistes d’action. Presses de l’Université de Laval. Québec. Pages 34.

    [2] Valois, J. (1993). Sociologie de la famille au Québec. Les Éditions CEC. Montréal. Page 235.

     

     

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